Biographie

"Mon chemin artistique commence à huit ans en recevant ma première boîte de peinture à l'huile. Aucun préjugé, des paysages directement d'après nature, il faut dire que j'avais à l'époque le premier prix de dessin à l'école communale (Martial Raysse en sort aussi et nous habitions la même maison). Vous verrez mon premier tableau montrable fait à douze ans.

Quoi que vous en pensiez, c'est bien ce tableau qui me fit rentrer aux Arts décoratifs de Nice à quinze ans. Malheureusement, cela ne dura qu'une année, du fait de la guerre qui me chassa du Beaulieu de ma naissance."
"En atterrissant à Paris, mes études reprirent et je m'inscrivis à la Grande Chaumière dans l'atelier d'Yves Brayer, puis par la suite dans celui d'André Lothe, qui ne comprenait rien du tout à ma peinture.
"On voit bien que vous venez du Midi, vous peignez avec tout l'arc-en-ciel, alors que moi, durant toute ma vie, je n'ai utilisé que trois couleurs!"

L'épisode suivant fut de faire des dessins de mode pour les journaux et pour Jacques Fath, comme celui du mannequin Lucky*. Je passe sous silence la reliure d'art que j'appris avec le maître Grezevaux, retiré à Nice. Malgré les beaux livres faits, même pour le Pape Pie XII, ce n'était pas mon chemin."
"Beaucoup de directions se croisent et je ne sais plus où j'en suis; ah oui! Une tomate par jour c'est insuffisant; c'est là qu'en me proposant de pousser des chariots de nuit chez Kodak (usine de Vincennes), je fus sauvé par un grand directeur: il vit que j'avais fait les Arts décoratifs, seule carte officielle en dehors d'un ausweis qui traînait encore dans mon portefeuille.

Là tout changea pour moi car Kodak lançait alors en France un certain procédé qui devait se mettre en couleur au pinceau. "Procédé Flexichrome", on me fit faire volte face, et de technicien de surface, je rentrais officiellement dans les laboratoires de recherche couleur au milieu de quatre cents ingénieurs, dans les hauts polymères, je ne connaissais rien à la photographie. Après des lectures explicatives indigestes, je me suis mis à peindre. Le résultat fut immédiat. On m'a aussitôt donné des responsabilités et j'appris, moi aussi, à manipuler les atomes. Cela dura cinq années pratiques."
"La photographie s'est placée comme un complément logique de la peinture et du dessin.

Les prix arrivèrent: Trophée Hutchinson aux U.S.A, puis à la Chambre de Commerce de Paris, et les autres aux U.S.A. presque chaque année. Là, la photographie est devenue mon nouveau langage.

En 1953, Jean Chevalier, éminent photographe, venait de monter depuis peu d'années les Studios de ELLE, avec Madame Lazareff et me proposa de me joindre à cette grande aventure, celle-ci dura dix ans;

quel monde opposé et exaltant!

En 1962, j'ai eu mon studio-laboratoire, où je me suis développé comme d'habitude dans toutes les directions, à l'encontre de maintenant, où l'on voit des spécialistes de l'oreille gauche!"
"Mes recherches personnelles m'ont amené à réaliser des campagnes novatrices comme celle de la Woolmark en 1966, avec William Klein.

Ces recherches et leurs aboutissements m'ont fait admettre comme seul photographe dans le "Groupe Espace" présidé par Sonia Delaunay; ces réunions consistaient, en général, à confronter et à établir des rapports plus proches entre toutes les disciplines artistiques. Pour quelqu'un qui parlait peu, il y avait beaucoup à écouter et à apprendre, toujours cette boulimie!!!

Tout en continuant mon travail personnel, j'ai enseigné pendant huit ans, une année à l'Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris et sept années à l'E.S.A.G. (Ecole supérieure des Arts graphiques de Paris, Académie Julian).

L'échange est un cadeau luxueux, merveilleux, que l'on garde dans son coeur."
"Durant cette longue carrière, je me suis toujours réservé du temps pour peindre, cette drogue première ne m'a jamais quittée.

Pas riche, mais comblé intérieurement. Parmi mes réalisations publicitaires ou rédactionnelles, j'ai longtemps travaillé pour Chanel, Air France, Mercedes, Guerlain, Dior, Harper's Bazaar et Vogue.

En 1985, j'ai eu un hommage avec une exposition importante au Grand Palais à Paris, dans le cadre du Salon d'Automne.

Quant aux "procédés", ils font partie pour le moment des énigmes de l'histoire; et, si je puis me permettre de reprendre une phrase de Picasso, c'est elle qui définirait le mieux mon cheminement: "Ce qui me sauve, c'est que chaque jour je fais pire"."
"Et maintenant que ma vie m'a enseigné la bonté, je n'aspire plus qu'à m'éteindre en regardant la mer - la seule qui m'ait bercé au long de mon enfance- tout en nourrissant le fragile espoir, de bientôt retrouver une mère inconnue pour enfin l'étreindre silencieusement."